17 mars 2007
CioccolaTÒ
Turin, capitale intergalactique du chocolat
C'est vrai, il y a de quoi être surpris : chaque année, Turin est déclarée capitale interstellaire du chocolat, et tout le monde a l'air de trouver ça normal. Mis à part peut-être les belges, les suisses, et les gens qui viennent nous rendre visite.
Les turinois, eux, sont sûrs de leur fait : Turin, c'est la ville du chocolat et puis voilà et puis c'est tout.
Essayons de comprendre avec une preuve par neuf en quatres parties distinctes : thèse, antithèse, synthèse, prothèse.
Sujet : "chocolat douceur, chocolat bonheur, cette confiserie vient-elle de Turin ?", développer-couché en quatre par quatre.
De tous temps, les hommes ont cherché à se dépasser, notamment en terme de chocolat.
"Citius, altius, fortius", "Plus loin, plus haut, plus fort" comme disait souvent Pierre de Coubertin.
Nous verrons donc dans un premier temps en quoi le chocolat vient de Turin, puis nous étudierons le lien entre la ville et le chocolat, et pour conclure nous démontrerons que le chocolat vient bien de Turin.
Première partie
1560 : Emmanuel Philibert, roi de Savoie, vient d'apprendre par son valet de chambre que la capitale du royaume est transférée de Chambéry à Turin. Etreint par une joie intense, il décide de fêter dignement la nouvelle. Il pense bien entendu à un petit apéritivo sympatoche, mais il n'y a plus de vermouth et il se rabat sur une bonne tasse de chocolat chaud au coin du feu.
C'est moins rock and roll, mais ça reste exceptionnellement festif. Cette histoire fait le tour de Turin, et pas plus tard que le lendemain, tous les turinois fêtent à leur tour l'évènement une tasse de chocolat à la main. C'est du jamais vu, et c'est ainsi que débute l'histoire d'amour entre la ville et le chocolat.
Deuxième partie
1606 : la chocomania
Mais le cacao fait vraiment vraiment son arrivée dans la région transalpine en 1606. D'après nos calculs, cela faisait donc 46 ans que les habitants faisaient semblant de déguster du chocolat chaud, une tasse imaginaire à la main, le chocolat étant jusque là, réservé à la famille royale. Nous ne voyons pas d'autre explication logique à ce trou historique d'un demi-siècle. Les historiens planchent encore dessus.
A partir de là, les chocolatiers éclosent comme des petits pains, tout un chacun devient chocolatier, c'est la nouvelle marotte à Turin. On raconte par ailleurs que Casanova en était un consommateur effréné, et que c'était la seule chose qui lui permettait de tenir la cadence en terme de conquêtes et d'exercice physique.
L'histoire fait le tour de Turin, et pas plus tard que le lendemain, les turinois se ruent sur ce précieux expédient.
Troisième partie
Les deux siècles suivants s'écoulent sans anicroche, et Turin reste la ville de référence en terme de chocolat. En 1802, les chercheurs en chocolat mettent au point une technique qui permet de solidifier le chococroque pour en faire des tablettes. Les choses se gâtent lorsqu'un petit suisse apprenti, François-Louis Cailler, file en douce avec les plans de la machine et rentre au pays, pour fonder, comme par hasard, la première chocolaterie suisse.
On dit les suisses, les suisses, mais à Turin aussi on sait faire du chocolat en tablette, oui madame parfaitement, on en fait même en forme de fromage et de saucisson, c'est vous dire s'ils sont forts
Et c'est ainsi qu'encore aujourd'hui, les gens sont persuadés que le chocolat est une spécialité suisse.
Par ailleurs, les turinois vouent une haine sempiternelle à ce jeune félon, d'où l'expression "c'est laid, Cailler" mais bon ça on en est pas sûrs sûrs. A vérifier.
Quatrième partie
Enfin en 1852, les turinois contre-attaquent et inventent un chocolat fabriqué avec du lait, du sucre, du cacao et les merveilleuses noisettes du Piémont. Comme il vous dégueulasse les doigts comme un rien, ils l'emballent dans un papier doré.
C'est le premier chocolat emmailloté de l'histoire de l'humanité.
Et, sans raison particulière, ils lui donnent une forme de petit bateau.
A l'issue de 13 ans de tests qualité et de crash tests en tous genres, le chocolat est prêt à être lancé sur la place publique.
En 1865, à l'occasion du célèbrissime carnaval de Turin, un certain Peyrano, maître-chocolatier de son état, reprend donc la recette et la propose à un panel de consommateurs.
Le succès est tel que, distinction suprême, la friandise reçoit le nom de la mascotte du carnaval, la fameuse marionnette Gioan d'la douja (Jean de la Chope), qui tient elle même son nom d'un paysan piémontais qui s'enquillait pas mal de chopes (douja) au comptoir.
Caffarel, un gros bonnet du Gianduja
Rendez-vous compte, c'est un peu comme si vous inventiez un dessert sublime et qu'on l'appelait "Guignol" en vous assurant que c'est vraiment parce que c'est vous. Bref. Le Gianduja était né.
Bien plus tard, lors de leur mariage Grace Kelly et le Prince Rainier III le choisiront comme bonbon de noces.
L'histoire fait une fois de plus le tour de Turin, et pas plus tard que le lendemain, tout le monde s'en fout.
En conclusion, nous avons brillament démontré, à l'aide d'arguments historiques parfaitement véridiques, que le chocolat vient de Turin. Mais on pourrait se demander si Turin vient du chocolat ?
Ah tiens on devait vous parler du Salon du chocolat.
Eh bien c'était très bon.
Et si vous n'y étiez pas, il vous reste toujours les yeux pour admirer nos photos et pour pleurer.
Sandrine et Patrick d'un commun accord.
20:45 Publié dans Gastronomie | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : cioccolato, torino, chocolat, gianduja, gianduia